Exclu: "Di Maria souffre du départ d'Ibra"

Journaliste à L'Equipe depuis 2004, Sylvain Ligorred a accepté de répondre à nos questions concernant l'actualité du club de la capitale. 

Paristeam.fr : Le rachat de l'OM est-il une bonne chose pour le PSG ? 

Sylvain Ligorred : Oui et non ! Oui d'un côté, car un possible concurrent de poids en championnat va obliger Paris à ne pas s’endormir sur ses lauriers et à rester compétitif durant l'ensemble de la saison, ce qui lui permettra peut-être d’être plus performant en Ligue des champions. Un peu comme au début des années 90 quand Bernard Tapie encourageait Canal+ à investir au PSG afin que l’OM ait un sparring-partner en Ligue 1. Avoir le titre assuré trop tôt et ne pas disputer suffisamment de rencontres âpres en L1 n’a pas forcément rendu service aux Parisiens en Coupe d’Europe. Il y a toujours le risque que les joueurs prennent le championnat de haut et tombent de haut lorsqu’ils affrontent les ténors des autres championnats. D'un autre côté non, car si l’OM retrouve son standing, Paris n’enrichira peut-être plus aussi facilement son palmarès comme ce fut le cas lors des dernières saisons et depuis l’arrivée de QSI.

Areola, Rabiot, Kimpembe, Augustin... Finalement après l'OL, le PSG n'est-il pas ce qui se fait de mieux en France en terme de formation ?

Effectivement, bon nombre d’excellents jeunes sont formés à Paris. Areola a suivi un plan de carrière linéaire avant de revenir au PSG et de s’imposer. Il fait vraiment partie des meilleurs gardiens français aujourd’hui. Rabiot est devenu un joueur essentiel du milieu de terrain parisien, il ne manque plus grand-chose pour qu’il devienne un titulaire indiscutable d’Unai Emery, et ses premiers pas en Bleu ne vont pas tarder non plus. Contre des grosses écuries comme le Real ou Chelsea, il a démontré qu’il évoluait déjà à un très haut niveau et sans complexe. Pour Kimpembe et Augustin, en revanche, restons patients. Ils ont des qualités, à eux de confirmer sur la durée s’ils ont la chance d’avoir du temps de jeu, à Paris ou ailleurs. En tout cas, tous ces jeunes talents montrent que Paris, malgré sa puissance financière, n’a pas forcément besoin de recruter systématiquement. Bien entourés par les cadres du vestiaire et le staff, ces jeunes-là peuvent faire office de doublures, avant de titiller les titulaires selon leurs évolutions et leurs qualités. À l’image de ce qu’il se passe à Barcelone ou au Real par exemple.   

A-t-on surestimé Angel Di Maria ?

Surestimé non. Di Maria ne gagnera jamais le Ballon d’or, mais il reste un joueur de très haut niveau, comme il l’a prouvé à Benfica puis au Real. Il marque un peu le coup actuellement, semble souffrir du départ d’Ibra avec qui il s’entendait bien sur le terrain, mais n’oublions pas que la saison dernière, son intégration à Paris a été rapide et son apport immédiat en Championnat. Si Paris s’est baladé la saison dernière, c’est aussi en grande partie grâce aux performances de l’Argentin. À Unai Emery de le remettre en confiance, dans un rôle et dans un système où il démontrera de nouveau l’étendue de son talent. En revanche, c’est en Ligue des champions que Di Maria me laisse sur ma faim. Il a été recruté pour faire franchir un palier à Paris dans cette compétition, et pour l’instant, on en est loin.

Comprenez-vous le rôle de Patrick Kluivert ? 

Pas vraiment. J’ai été surpris par son arrivée, d’autant qu’il n’a aucune expérience à ce poste. Je veux bien que ce soit un « nom » dans le football européen, mais ce choix interpelle, Paris est un des clubs les plus riches du monde, je m’attendais davantage à un cador à ce poste plutôt qu’à un novice. D’autant que depuis son arrivée, il semble très discret. J’ai lu qu’il était encore en phase d’observation… Bon, on est juste au mois de novembre, il serait temps qu’il justifie son salaire ! Mais peut-être mène-t-il des missions en interne, notamment auprès des jeunes ou dans l’organisation de la cellule de recrutement, qui reste confidentielle.

Votre avis sur l'intransigeance des observateurs français à l'égard d'Émery ?

Disons que deux défaites dès le début du Championnat, soit autant que la saison dernière, ça fait un peu tâche… Sa gestion de l’effectif, notamment Ben Arfa, Verratti, ou les gardiens, ne fait pas l’unanimité. Les recrutements de Jesé et de Krychowiak, qui ne jouent quasiment jamais, pourraient vite devenir un bide fort coûteux. Mais si au final Paris termine champion et finit dans le dernier carré de la C1, Émery fera taire une grande partie des critiques. En revanche, Émery a été recruté pour ses trois C3 gagnées et donc pour son expérience de la Coupe d’Europe. Mais la Ligue Europa, ça reste la « petite » Coupe d’Europe. Même si Émery a prouvé qu’il savait préparer son ancienne équipe pour des matches couperets, la C1 c’est un autre niveau.  

PSG - Ben Afa : l'amour impossible ?

Pour l’instant, cela ne colle pas et cela ressemble à un fiasco. Est-ce seulement un souci avec son coach ? À Marseille, il a eu des rapports compliqués au départ avec Éric Gerets puis avec Didier Deschamps. Mais il est finalement parvenu à les convaincre de le faire jouer et il a été décisif et primordial dans les deux belles saisons de l’OM en 2008-2009 et 2009-2010. Peut-être que l’histoire sera identique avec Émery. Autre point, à Paris il est un bon joueur parmi d’autres, tout l’inverse de la saison dernière à Nice, où il était à la fois le leader technique et le joueur le plus médiatique. À lui de démontrer, à l’entraînement comme lors de ses entrées enjeu, certes rares et courtes, qu’il peut devenir un maillon essentiel du PSG, tout en gardant un comportement irréprochable. Mais une chose est sûre, Ben Arfa marche à l’affectif et s’il ne sent pas en confiance ou apprécié à Paris, il n’y fera pas de vieux os.

Clément Pernia